Le Sénégal n’a pas encore de coup d’Etat

Le Sénégal n’a pas encore de coup d’Etat

Le Sénégal n’a pas encore de coup d’Etat et je forme le voeu qu’il ne le connaisse jamais. Les ruptures de démocratie ne résolvent pas les problèmes de démocratie, ils les reportent. Elles ne sont pas la panacée, elles ne résolvent rien, mais aggravent les maux en reportant la résolution des problèmes.
Le niveau de culture des militaires détermine leur propension à faire des coups d’Etat. Mal instruits , peu cultivés , ils surestiment leurs compétences et se croient aptes à faire mieux que ceux qu’ils renversent. Les plus instruits des militaires et plus cultivés sont plus intéressés à réformer l’armée qu’a faire des renversements de régime . Quid du syndrome d’hubris ?
« Je rends à nouveau grâce à Dieu et me réjouis de ce que notre cher Sénégal ait, jusqu’ici, échappé aux tentatives de coup d’État qui furent légion en Afrique au lendemain des indépendances. Je souhaite vivement qu’il en soit ainsi pour toujours. Si nous n’avons pas connu cette atteinte à la démocratie, il me semble que c’est en grande partie parce que, terre de vieille culture politique et de tradition démocratique bien ancrée, le Sénégal a eu également la chance d’avoir une armée républicaine faisant corps avec la nation. Nombre de ceux qui composent notre armée, sous-officiers comme officiers, après de solides études dans le cursus scolaire, ont embrassé ce métier avec amour et dévouement. Formés dans les grandes écoles militaires, ils sont donc pour la
plupart des hommes de culture avec une profonde connaissance de l’Histoire et des grandes idées qui en ont été les moteurs.
J’ai revu récemment un documentaire retraçant la visite officielle que le président Senghor avait effectuée en Martinique à l’invitation de son ami Aimé Césaire. Il y a dans ce film un passage où un officier de l’armée sénégalaise, aide de camp du président Senghor, sollicite une photographie avec l’illustre poète martiniquais. Et le président Senghor de dire à son ami, avec une pointe de fierté, que tout le long du vol qui les conduisait vers lui, il avait remarqué que cet officier était plongé dans la lecture d’une thèse qu’un professeur africain avait consacrée à Aimé Césaire. Et ce dernier de féliciter le président Senghor par ces mots : « Je constate que vous avez une armée d’intellectuels, et cela est une très bonne chose. »
Extraits des Mémoires du Président Abdou DIOUF, publiés chez Seuil en 2014 (pages 272-273).

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